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Avec 92,6 milliards d’euros dépensés sur Internet en 2018 soit +13.4% par rapport à 2017, l’e-commerce n’a pas fini de bouleverser le monde du retail. Plus rapide, plus pratique et plus complet, il suffit aujourd’hui de s’emparer de son smartphone pour faire ses achats en ligne comme le font déjà 13,8 millions de Français (Fevad, 2019). 

Pour autant, cette croissance n’est pas bien vue par tout le monde et de nombreux défauts sont pointés du doigt : des cartons à moitié vide, des paquets qui font le tour du monde, des produits qui polluent, des milliers de retours neufs détruits… L’impact sociétal et environnemental du e-commerce est aujourd’hui vivement critiqué.

Le projet de loi sur le gaspillage et l'économie circulaire votée au Sénat insiste sur l’impact de notre consommation et démontre la nécessité d’améliorer notre système en profondeur. Se pose alors la question : peut-on faire de l’e-commerce un levier vers une consommation globale éco-responsable ?

Charlotte Darmet, fondatrice de Hoopi – solutions de colis éco-responsables, recyclables ou réutilisables à destination des e-commerçants, et Marie Chaudy, responsable marketing de Revers.io – solution SaaS de gestion des retours et du SAV, se penchent sur la question et livrent une analyse du e-commerce et de son évolution.

 

Peut-on faire de l’e-commerce un levier vers une consommation globale éco-responsable ?

53% des Français souhaitent mieux consommer (baromètre Greenflex 2017). Derrière cette consommation plus responsable, se trouve la volonté de favoriser les produits labellisés, certifiés éthiques, locaux et/ou moins polluants. Quand on sait que seulement 27% des Français font confiance aux marques (-30,7pts vs 2004), de vrais changements sont attendus !

 

Une consommation responsable poussée par l’offre online

L’e-commerce joue un rôle essentiel dans cette transition. Ce canal de distribution permet de rendre accessible au consommateur toute une panoplie de produits responsables parfois impossibles à trouver en magasin. La demande créant l’offre, ce sont aujourd’hui les consommateurs qui poussent les distributeurs à innover de manière à proposer des produits durables et non-polluants.

 

consommation responsable

 

Côté marchand, l’e-commerce permet à de jeunes entreprises éco-responsables de se lancer et de toucher un public étendu dès leur création. C’est par exemple le cas de la marque Hopaal (vêtements recyclés faits en France), d’Ector (baskets made in France, fabriquées à base de bouteilles en plastique et recyclables), des Minis Monde (jouets en plastique recyclé made in France) ou encore de We Dress Fair (une marketplace engagée dédiée aux marques éthique).

 

La livraison, bête noire du e-commerce responsable

L’impact du e-commerce est difficile à mesurer mais toutes les études s’accordent à pointer du doigt la livraison à cause de deux facteurs : les déchets qu’elle produit et l’empreinte carbone du transport

Pour commencer, la quasi-totalité des cartons/plastiques utilisés lors de la livraison est jetée après une seule utilisation. Un impact d’autant plus conséquent que le nombre de colis distribués en France devrait passer le milliard en 2020 (étude Xerfi, 2018). Un déchet visible et encombrant pour les consommateurs qui alertent de plus en plus leurs e-commerçants sur le sujet : cartons disproportionnés, éléments de calage imposants, contenants non recyclables... S’il s’agit du dernier élément dont s’occupe le e-commerçant dans la chaîne logistique, le colis est aussi le premier contact du consommateur avec la marque. Un enjeu clé pour lequel il n’est pas toujours facile de mettre en place une solution éco-responsable.

C’est la mission que Hoopi s’est fixée. Cette toute jeune startup s’est donnée comme objectif de permettre aux e-commerçants de limiter les déchets générés par leurs livraisons en mettant en place une alternative plus durable, tout en préservant l’expérience client : soit grâce au colis réutilisable, soit en mettant en place un colis 100% recyclable.

Le transport est également un point important dans le bilan d’une livraison e-commerce. La croissance du nombre de colis oblige les transporteurs et les logisticiens à innover et à trouver des alternatives responsables. Les tournées optimisées permettent par exemple d’éviter des flux de transport individuel (un camion livre un quartier plutôt que chaque habitant se rendent au magasin avec chacun leur mode de transport). La mutualisation du transport massifie les flux de plusieurs entreprises d'une même région afin de rayonner ensemble sur le reste du pays.

massification-mutualisation-transport

Toutefois, l’impact des livraisons e-commerce dépend beaucoup du choix du mode de livraison choisi par le consommateur : un colis livré en Point Relais aura un impact plus faible qu’un colis livré en express à domicile (encore plus s’il vient de l’étranger). L’éco-comparateur Colissimo est un bon outil pour se rendre compte des paramètres qui influent sur l’impact de la livraison. Un enjeu qui mériterait d’être mieux expliqué et partagé aux consommateurs, d’autant plus que 79% d’entre eux se déclarent conscients voire préoccupés par l’impact environnemental de leurs livraisons (étude globale Metapack 2018).

L’augmentation des retours, un challenge de tout instant

La croissance des retours pose elle aussi de vrais problèmes aux marques, tant écologiques que économiques. Aujourd’hui, 41% des consommateurs avouent acheter “souvent” ou “parfois” plusieurs produits à la fois avec l’intention d’en retourner certains (MetaPack Research Report, 2018). Le nombre de retours ne cesse de croître et atteint des sommets à Nöel. Le 3 janvier est le jour record, appelé “National Returns Day” par les Américains : sur cette seule journée, plus de 1,4 million de paquets passent entre les mains des livreurs d’UPS. 

Il y a un vrai enjeu dans le e-commerce circulaire à rationaliser ces retours et les réinjecter au plus vite dans un stock pour éviter leur destruction.

C’est la mission que s’est fixée Revers.io, la plateforme de gestion intelligente des retours, déjà utilisée par Fnac-Darty, Boulanger, La Redoute ou encore Carrefour.

Le principe de la plateforme est d’établir un premier diagnostic sur la cause du retour avec le client pour lui proposer une solution adaptée (réparation / envoi de pièces détachées vs retour entrepôt) et renvoyer directement son colis au bon interlocuteur. L’idée est de réduire au maximum les trajets de transport pour limiter la pollution engendrée par les colis retour.

La plateforme permet également de proposer une solution immédiate au consommateur sans insérer d’étiquette de retour prépayée dans le colis aller. Quand on sait que 76% de ces étiquettes ne sont pas utilisées, c’est autant de papier économisé.

Bien gérer et tracer ses retours aide ensuite le distributeur à redonner une seconde vie à ses produits et les réinsérant rapidement dans un cycle de vente.

 

La gestion des invendus, enfin réglementée

De nos jours, ce sont 630 millions d’euros de produits neufs qui sont détruits chaque année (Phénix) et 13% des marchandises sont détruites en GSS. Ces enseignes sont d’ailleurs 70% à déclarer ne pas avoir mis en place de filière de valorisation de leurs déchets au sens énergétique du terme (Ipsos pour Comerso 2019). Alors quel rôle joue le e-commerce dans cette gestion négligée de ces invendus ?

Tout d’abord, Internet permet de réaliser plus facilement des opérations spéciales pour écouler ses stocks d’invendus : ventes flash, promotions spécifiques, ventes privées, etc. Aussi, grâce leur audience importante, les marketplaces sont un moyen efficace de vendre son surstock en touchant un nouveau public. 

Parallèlement à cela, en accentuant certains comportements, des scandales ont vu le jour qui ont alerté l’opinion publique. Les Français ont par exemple été scandalisés d’apprendre qu’Amazon a jeté 3 millions de produits en France l’an dernier, faute de les réinjecter dans ses stocks. Cela a entraîné une prise de conscience collective, portée par le projet de loi économie circulaire voté au Sénat qui accentue la lutte contre le gaspillage. Il s’agit du premier texte qui s’attaque au gâchis de produits non-alimentaire.

Le projet de loi crée une obligation de réemploi, de réutilisation ou de recyclage des invendus de ces produits neufs, “par les producteurs, importateurs et distributeurs, y compris pour la vente à distance”.

Aujourd’hui, Amazon a commencé à réagir en permettant à ses vendeurs utilisant le service Fulfillment by Amazon (FBA) de faire don par défaut du stock dont ils souhaitent se débarrasser. Les invendus et les indésirables sont alors transmis à des associations caritatives. Un premier pas vers une meilleure consommation.

objectif zéro déchet

 

 

Le reconditionné, un marché en hausse

Le marché du reconditionné est aussi un secteur en pleine expansion grâce à Internet. Les consommateurs cherchent des moyens de consommer autant, en consommant mieux. Par exemple, le marché du smartphone neuf a baissé de 6,5% en France (Institut d’études GfK, 2018), tandis que les ventes de téléphones d’occasion ont bondi de 7%, soit 2,1 millions d’unités vendues. C’est aujourd’hui un Français sur dix qui achète son smartphone d’occasion, redonnant une seconde vie à des produits déjà utilisés. La croissance d’acteurs comme Back Market, Recommerce ou Remade, montre bien l’intérêt des consommateurs autour du “mieux consommer” dans l’univers technologique, loin de la course à la dernière innovation. 

Dans le secteur de la mode, c’est le développement spectaculaire de Vinted qui prouve l’engouement des consommateurs sur la “seconde main”. Sur une même plateforme, un particulier devient vendeur et acheteur, profite de bons plans et vend pour réinvestir lui-même dans d’autres vêtements.

Parallèlement, des services de locations se développent (Le Closet, Les Cachotières, Panoply pour les vêtements, ConsoGlobe et Zilok pour un service de location entre particuliers ou pros, Darty, UZ’it, Boulanger pour l’électroménager, etc) qui permettent de louer des produits au lieu de les acheter : une bonne manière de ne pas ralentir sa consommation tout en offrant une seconde vie assurée à ses produits.

L’exigence de transparence et d’éco-responsabilité des consommateurs ainsi que l’évolution du contexte légal vers plus de circularité vont obliger l’ensemble des acteurs de la vente en ligne à réhausser leur service et penser leur activité de manière plus durable et circulaire.

Cette tendance provoque des changements profonds mais elle est largement récompensée par la fidélité des consommateurs : pour près de 70% des acheteurs, le fait qu'une marque propose des produits éco-responsables renforce leur confiance en elle et les incitent à commander de nouveau (baromètre Greenflex, 2017).

L’économie circulaire est bien en marche, portée en partie par le e-commerce !

 

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